la mère amère
Ne suis je donc pour toi qu'une peste contagieuse
A fuir, coûte que coûte pour sortir victorieuse
Dont il faut goutte à goutte, extraire le venin
De la moitié du sang maternel qu'est le mien,
Ne suis je donc pour toi à présent qu'une absente
Gommée, effacée, détruite et transparente,
Dont il faut, vaille que vaille nier toute présence
Une étrangère, une oubliée, fantôme de ton enfance,
Ne suis je donc pour toi que celle que tu ignores,
Faute de goût dans ton présent décor
Qu'on arrache, qu'on déchire ou qu'on range
Dans le fond du tiroir des objets qui dérangent,
Et puisqu'il semblerait qu'à ce point tu détestes
L'humain quand il chavire dans de sombres détresses,
Cet humain dérangeant avec ses déraisons
Qui noircit de nuages ton azur horizon,
Tu préfères alors pour protéger tes murs
Enfiler une cuirasse, une pesante armure
Dont le poids est si lourd, qu'il m’entraîne vers le fond
Mais qu'importe, tu en as toutes les bonnes raisons
Je suis celle à présent à qui tu ne dois rien
Que le souffle d'une vie, un irritable lien
Qu'on coupe comme un cordon pour pouvoir respirer
Et tirer le rideau sur l'avant, le passé,
Oublié l'amour, oublié les bras berçants
Oublié les premiers pas, oublié l'enfant
Les comptines, les histoires et les tout premiers mots
Les mains qui lâchent la scelle du tout premier vélo,
Oublié la rentrée à l'école et l'attente du soir
Les bras tendus au bas des toboggans, les heures de balançoire
Tous les anniversaires, et les jeux préparés
Les rires dans le jardin, les bougies allumées,
Oublié les déguisements de rien imaginés des carnavals
Les défilés de Saint Nicolas, jour de fête patronal
Oublié les Noël, les sapins, la maison décorée
Juste pour voir dans les yeux des enfants une lumière scintiller,
Les soins des petits bobos par des souffles magiques
Oublier les sourires, déchirer les photos comme de vielles reliques
Les dessins colorés, les tout petits poèmes
Qui souvent finissaient par un « Maman, je t'aime »
Oublier ce qui fut, l'essentiel est de fuir
Et ne garder en soi que le mal et le pire
Les heures douloureuses, les absences, les non-dits
Pour réduire à néant tout un pan de ma vie,
Ne suis je donc pour toi qu'une peste contagieuse
A fuir, coûte que coûte pour sortir victorieuse
Dont il faut goutte à goutte, extraire le venin
De la moitié du sang maternel qu'est le mien,
Ne suis je donc pour toi à présent qu'une absente
Gommée, effacée, détruite et transparente,
Dont il faut, vaille que vaille nier toute présence
Une étrangère, une oubliée, fantôme de ton enfance,
La mère de ta vie, l'amer de ta vie,